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Les hélicoptères dans l'armée de l'Air : Etat des lieux

Les hélicoptères dans l'armée de l'Air : Etat des lieux

Dans l'armée de l'Air aujourd'hui, les hélicoptères sont engagés quotidiennement en métropole dans des missions de service public et pour la permanence opérationnelle (ou MASA, mesures actives de sûreté aérienne), ils sont déployés sur les théâtres d'opérations des forces armées françaises, pré-positionnés sur d'autres bases aériennes et sont projetés sur les territoires d'outre-mer. Indispensable au bon déroulement des opérations, le parc actuel des hélicoptères de l'armée de l'Air souffre pourtant de plusieurs problèmes qui sont aujourd'hui identifiés.

Ainsi, dans son avis « Préparation et emploi des forces : Air » dans le cadre du projet de loi de finances pour 2020, M. le député Jean-Jacques Ferrara de la Commission de la défense et des forces armées (Assemblée Nationale) dresse un état des lieux complet et intéressant (nombre de machines, disponibilité, problèmes, …) sur le parc des hélicoptères au sein de l'armée de l'Air.

© Armée de l'Air - Un H225M Caracal au-dessus du Sahel.

© Armée de l'Air - Un H225M Caracal au-dessus du Sahel.

1. QUELLES MISSIONS ?

En 2019, l'armée de l'Air dispose d'un parc d'hélicoptères qui comprend 75 machines sur les 430 de quinze types différents dont dispose le Ministère français des Armées avec notamment l'Aviation Légère de l'armée de Terre (ALAT) qui concentre la grande majorité des hélicoptères. Parmi cette flotte de 75 hélicoptères, l'ensemble est éclaté à la fois sur le territoire français et les différents détachements dans des pays étrangers ou en outre-mer, et il assure une très large gamme de missions qui sont variées.

Ainsi, les escadrons de l'armée de l'Air sont capables de réaliser des missions :

- d'aéromobilité avec le transport de troupes et de matériels en métropole, en outre-mer ou en opération extérieure. Cela comprend également le transport des autorités gouvernementales (mission AUG) depuis la base aérienne de Villacoublay. Dans ce cadre là, le député écrit que « les trois Super Puma de la base de Villacoublay ont effectué 465 heures de vol en 2018, et 281 au cours des huit premiers mois de l’année 2019 ». Si plus de la moitié des heures de vol réalisées en 2018 et en 2019 sont des missions de formation et d'entraînement, le reste a été effectué au profit de « l’état-major particulier du président de la République, avec 19 heures de vol, et [du] secrétariat d’État auprès de la ministre des Armées, avec 17 heures de vol ».

- de l'appui-feu, renseignement ou médical avec l'utilisation, par exemple, du canon de 20mm sur les Fennec pour faire de l'appui aérien rapproché au profit des troupes au sol, de la surveillance et l'ouverture d'itinéraire pour les convois militaires, etc…. Les Fennec ont notamment été utilisés pour l'ensemble de ces missions lors de l'opération Sangaris, en Centrafrique, entre 2013 et 2016.

- des évacuations sanitaires (EVASAN) ou des évacuations médicales (EVAMED, avec un médecin à bord de l'hélicoptère). Ces moyens permettent de compléter les moyens aériens du service public (Sécurité Civile ou SAMU) en cas d'une forte demande en hélicoptères ou pour assurer des missions de secours que les moyens de la Sécurité Civile ou du SAMU ne peuvent réaliser car ils n'y sont pas habilités comme par exemple lors de conditions météorologiques difficiles ou pour apponter sur des navires équipés d'héliports puisque les DRAGON de la Sécurité Civile n'ont pas cette qualification (même s'ils sont aptes).

- des opérations de recherche et de sauvetage (SAR, search and rescue) pour rechercher et secourir, par exemple, des randonneurs perdus en forêt ou en montagne, des marins qui auraient chaviré, un avion qui se serait écrasé, etc…. Ainsi, « l’escadron 1/44 Solenzara a secouru 21 personnes au cours de 14 missions en 2017, 25 personnes au cours de 15 missions en 2018 et 22 personnes depuis le début de l’année dans le cadre de 22 missions », peut-on lire dans l'avis du rapporteur.

- des missions de Recherche et de sauvetage au combat (CSAR, combat search and rescue) pour récupérer un équipage qui s'est éjecté en territoire ennemi,

- de la permanence opérationnelle avec l'assistance d'aéronef en détresse ou l'interception d'aéronef suspect depuis les bases aériennes de Villacoublay, Orange, Bordeaux et Saint-Dizier. 

- et enfin des missions au profit des forces spéciales avec du contre-terrorisme aérien et maritime, des missions d'infiltration dans la profondeur ou des actions contre des objectifs ciblés, etc…

© J. Lempin / Marine nationale - Un Fennec de l'armée de l'Air équipé du canon de 20mm au-dessus de la Centrafrique.

© J. Lempin / Marine nationale - Un Fennec de l'armée de l'Air équipé du canon de 20mm au-dessus de la Centrafrique.

2. QUELLE FLOTTE ?

Au 1er juillet 2019, le parc des hélicoptères dans l'armée de l'Air est constitué comme tel (voir tableau ci-dessous) avec cinq flottes différentes dont certaines sont relativement petites. A titre d'indication, les trois AS332 Super Puma correspondent aux appareils dédiés aux missions AUG depuis la base aérienne de Villacoublay, tandis que les H225 correspondent aux hélicoptères qui ont appartenu à la Marine nationale et qui ont été reversés au Groupe aérien mixte 56 « Vaucluse », qui réalise des missions au profit de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE).

Les hélicoptères dans l'armée de l'Air : Etat des lieux
3. LES BASES AERIENNES

Dans l'armée de l'Air, le parc des hélicoptères est réparti dans douze unités (escadron, groupe, détachement ou centre) différentes et qui sont stationnées en permanence (outre les opérations extérieures) sur neuf bases à travers la métropole, l'outre-mer et les bases à l'étranger. En métropole, les unités sont basés sur la base aérienne 120 de Cazaux, 105 d'Évreux, 115 d'Orange, 126 de Solenzara et 107 de Villacoublay, dans les territoires d'outre-mer ces unités sont implantées sur la BA 367 de Cayenne-Rochambeau et 186 de Nouméa, ainsi que sur deux implantations à l’étranger avec la BA 188 de Djibouti et l'élément Air 470 de Libreville, au Gabon.

Les hélicoptères dans l'armée de l'Air : Etat des lieux
Les hélicoptères dans l'armée de l'Air : Etat des lieux
4. QUEL TAUX DE DISPONIBILITE ?

L'armée de l'Air a transmis les taux de disponibilité de ses différentes flottes d'hélicoptères au cours de ces dernières années et jusqu'au premier semestre 2019, ainsi qu'en fonction des lieux d'où ils opèrent (métropole, outre-mer ou opérations extérieures). En août 2019, toujours au sein de l'armée de l'Air, le taux de disponibilité des H225M Caracal est de 49%, celui des Fennec de 43% et celui des Puma / Super Puma est de 36%. A l'inverse, à la même date et dans l'ALAT, la disponibilité des Caracal est de 31%, de 29% pour les Puma et les Cougar et enfin, de 23% pour les Fennec.

Les hélicoptères dans l'armée de l'Air : Etat des lieux
Les hélicoptères dans l'armée de l'Air : Etat des lieux
Les hélicoptères dans l'armée de l'Air : Etat des lieux

L'analyse du premier tableau, concernant les parcs qui sont stationnés en métropole, montre clairement une disponibilité inférieur à 50% pour tous les parcs, outre celui des Super Puma de Villacoublay pour les missions gouvernementales. Ces taux de disponibilité, connus depuis plusieurs années maintenant, limitent les missions d'entraînement et retardent la formations des jeunes équipages qui arrivent dans les unités.

La disponibilité des flottes en outre-mer est meilleure que celles en métropole puisque les Puma ont une disponibilité de 55% au premier semestre 2019 (contre 38,9% en métropole sur la même période) et les Fennec ont une disponibilité de 63,3% au premier semestre 2019 (contre 43,7% en métropole sur la même période). Enfin, en opération extérieure la disponibilité est bien meilleure puisque celle des H225M Caracal est de 83,6% au premier semestre 2019. Toutefois, et comme pour la très grande majorité de tous les parcs des forces armées françaises, la disponibilité en opération extérieure est toujours supérieure à celle de la métropole puisque la priorité est donnée aux missions opérationnelles.

Dans son avis, le député Jean-Jacques Ferrara décrit que cette disponibilité n'est « globalement pas satisfaisante » et met en lumière les sources de cette situation. D'abord, la flotte des Puma est en « souffrance » avec de nombreuses « défaillances techniques » due à son âge et la situation ne va pas aller en s'améliorant. Chez les Fennec, la disponibilité est aujourd'hui « source d'inquiétude » avec l'apparition des « premières difficultés » et « il paraît fort ambitieux d’espérer maintenir le parc jusqu’en 2036, dernière année de livraison des Guépard pour l’armée de l’Air ». Enfin, si la disponibilité des Caracal est correcte, elle va diminuer au cours des prochaines années avec « l'approche d'une période de grande visite pour des hélicoptères entrés en service il y a douze ans » et la tenue de « cycle d’entretiens majeurs ».

Outre l'âge, le manque de moyens financiers et la mise en place de programmes de rénovation qui font chuter la disponibilité des flottes, les industriels ont eux-aussi une responsabilité dans cette situation. Par exemple, il est expliqué dans l'avis que la durée normale d’immobilisation d’un hélicoptère Puma lors d'une visite périodique est de deux mois. Or, il arrive parfois que certaines machines soient immobilisées pendant « plusieurs mois, parfois jusqu’à dix-huit mois ». Il faut savoir qu'une visite périodique se fait tous les 36 mois pour un Puma, ce qui représente une capacité de 600 heures de vol au cours de cette période. « Or, ce délai courant à partir de la date théorique de sortie de l’appareil, et non pas de sa sortie effective, les équipages ne disposent plus d’une période de trois ans pour effectuer les 600 heures de vol prévues. Au final, les Puma ne voleront que 200 à 400 heures au lieu des 600 prévues », explique le député.

© USAF - Des membres des forces spéciales du  82nd Expeditionary Rescue Squadron s'entraînent depuis un Puma déployé à Djibouti.

© USAF - Des membres des forces spéciales du 82nd Expeditionary Rescue Squadron s'entraînent depuis un Puma déployé à Djibouti.

5. DES PREMIERES REPONSES :
  • La DMAé :

La Direction de la Maintenance Aéronautique (DMAé), créée par décret le 18 avril 2018 et placée sous la direction du Chef d'état-major des Armées (CEMA), succède à la SMIMAD (Structure intégrée du maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques du ministère de la défense). Elle a pour mission « d’améliorer la performance du maintien en en condition opérationnelle (MCO) des matériels aéronautiques et d’accroître la disponibilité des aéronefs du ministère des armées ». 

En coordination avec les industriels, et notamment Airbus Helicopters, la DMAé se place dans une démarche de verticalisation et de globalisation des contrats avec une plus grande responsabilisation des industriels pour la maintenance aéronautique . Ainsi, cela doit permettre de « réduire les délais d’attente de pièces » avec « l’installation au plus près des utilisateurs d’une interface avec l’industriel, du pré-positionnement de stocks avancés au plus près du besoin et des aéronefs et de la gestion par l’industriel de l’entièreté de la chaîne logistique, du dimensionnement des stocks et de la performance associée ».

  • Du côté des industriels :

Pour les industriels, la création de cette direction au sein des armées françaises a un impact important puisqu'ils doivent maintenant fournir « une logique « clé en main » reposant notamment sur des engagements fermes en matière de disponibilité, assortis de sanctions financières en cas de manquement ». Toutefois, le rapporteur précise que ce nouveau mode de fonctionnement, avec une plus grande responsabilité et une plus forte implication de l'industriel et de ses employés, ne doit pas « entraîner une perte de compétences » des mécaniciens, notamment parce que ce sont eux qui sont déployés sur les théâtres.

Ces solutions doivent permettre à l'armée de l'Air et plus généralement au parc aérien français d'avoir un « accroissement du taux de pièces couvertes par l’industriel » (de 80% à 100% dans le parc des H225M), un « approfondissement de la chaîne logistique, avec un représentant de l’industriel sur le terrain même des bases aériennes », ainsi qu'un « accroissement des taux de disponibilité de 5 % à 10 % selon les flottes ».