Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Defens'Aero
Defens'Aero
Menu
Formation des pilotes dans l'armée de l'Air : entre besoin de modernité et retards

Formation des pilotes dans l'armée de l'Air : entre besoin de modernité et retards

Actuellement, l'armée de l'Air est dans une phase de transition en ce qui concerne le cursus de formation des pilotes de chasse et des navigateurs. En effet, avec l'arrivée du PC-21 et la mise en place du projet FOMEDEC (Formation modernisée et entraînement différencié des équipages de chasse), l'ensemble du cursus de formation, de Salon-de-Provence jusqu'à la sortie du pilote après son passage en escadron de transformation opérationnelle, est en train d'être réorganisé pour qu'il soit moins coûteux, plus moderne et adapté aux aéronefs de dernière génération comme le Rafale.

Dans cet article, nous allons revenir sur les différentes étapes de la formation qui étaient appliquées au sein de l'armée de l'Air depuis de nombreuses années, celle qui entre en vigueur avec la mise en service des PC-21, mais aussi sur les différents retards constatés, notamment dans les escadrons en raison de plusieurs facteurs identifiés.

© Guillaume Normand - Un SR-22, utilisé par l'armée de l'Air pour la formation des élèves navigateurs et pilotes.

© Guillaume Normand - Un SR-22, utilisé par l'armée de l'Air pour la formation des élèves navigateurs et pilotes.

1. « L'ancien » cursus de formation :

Le cursus qui est actuellement modifié dure en moyenne quatre ans, se déroule sur quatre bases aériennes différentes et se décompose en quatre phases.

  • PHASE 1 (initiation) :

La phase 1 se déroule sur la base aérienne 701 de Salon-de-Provence. Dans un premier temps, l'élève va réaliser sa FMI (Formation militaire initiale) de cinq semaines environ, puis huit à dix semaines de FMGO (Formation militaire générale de l'officier). Au cours de ces deux sessions, l'aviateur va apprendre les bases du métier de militaire avec, par exemple, la formation au combat, à la topographie, au tir, aux sauts para, marche au pas, présentation réglementaire puis les particularités des officiers avec cours d'histoire, etc… L'ensemble dure environ trois mois.

Ensuite, l'élève découvre véritablement l'aéronautique puisqu'il intègre l'Escadron d'instruction de vol à voile. Cet apprentissage, de trois à six mois suivant les promotions et en fonction des contraintes, se déroule soit à Salon, à l'Ecole d'enseignement technique de l'armée de l'Air (EETAA 722) de Saintes ou au Détachement air 273 de Romorantin-Pruniers. Les élèves effectuent ici en moyenne 50 heures de vol sur planeur. Ils passent également en parallèle ou en suivant le TOEIC (Test of English for International Communication), afin d'apprendre et de perfectionner l'anglais et d'obtenir la PLS 33/33 qui correspond à une note de 785.

Toujours à Salon, les jeunes élèves rejoignent l'Escadron d'instruction sol du personnel navigant (EISPN), appartenant au Centre de formation aéronautique initiale (CFAMI) 5/312. C'est dans cet escadron que les pilotes vont passer l'ATPL (Airline Transport Pilot Licence). Les navigateurs ont 4 mois de cours seulement sur l'ATPL et ne passent pas le diplôme. Ces cours s'étalent sur six à sept mois environ. En fonction des promotions, l'ATPL est passé soit en une seule et même fois, ou alors en deux fois entrecoupé par les vols sur Cirrus.

Ces étapes passées, les aviateurs vont poursuivre la dernière étape de la phase 1 à Salon-de-Provence. Au sein des escadrons d'instruction en vol (EIV) 2/93 « Cévennes » et 1/93 « Aunis » sur Cirrus SR-20 (pour les pilotes) et SR-22 (pour les navigateurs), les élèves réalisent une formation initiale en vol. Généralement effectuée sur trois mois, elle comprend environ 25 missions (une vingtaine en vol, dont deux vols solo, et le reste sur simulateur) et représente un volume d'une quarantaine d'heures de vol. Pour les nav sur SR-22, c'est une soixantaine de missions entre huit et dis mois. Anciennement EIV, le 3/5 « Comtat-Venaissin » est devenu un escadron de standardisation composé uniquement d'instructeurs.

  • PHASE 2a et 2b (formation et sélection) :

Phase 2a : Les deux périodes de la phase 2 se déroulent sur la base aérienne 709 de Cognac. Arrivé sur place, les élèves vont intégrer l'Escadron d'instruction en vol (EIV) 2/12 « Picardie », qui est équipé de Grob 120. Cette progression va durer quatre mois environ, comprend 45 missions dont deux vols solo, soit environ 50 heures de vol. C'est le tronc commun, qui va ainsi permettre de sélectionner les pilotes qui poursuivront en Chasse ou en Transport. La spé-Chasse se fait à l'EIV 1/13 « Artois » et comprend, entre autres, quatre vols solo.

Phase 2b : D'une durée de six à sept mois environ, les élèves volent ici sur TB-30 Epsilon et continuent de se perfectionner avec une formation qui devient de plus en plus poussée. Ils effectuent au cours de cette période une centaine d'heures de vol.

  • PHASE 3 (spécialisation) :

Après Salon et Cognac, les élèves atterrissent sur la base aérienne 705 de Tours pour leur formation dans le cadre de la phase 3. Ici, exit les avions à hélices, les élèves débutent leurs vols sur les Alpha Jet de l'École de l'aviation de chasse (EAC). Pendant huit mois environ, ils vont effectuer une centaine d'heures de vol et quelques vols solo. Ce cursus, s'il est validé, va leur permettre d'obtenir leur macaron de pilote de chasse au cours d'une cérémonie appelée « macaronnage ».

  • PHASE 4 (apprentissage tactique) :

Le macaron en poche, ou plutôt sur la poitrine, les élèves-pilotes se rendent sur la base aérienne 120 de Cazaux, où ils intègrent l'Escadron de transition opérationnelle (ETO) 1/8 « Saintonge » ou 2/8 « Nice » sur Alpha Jet NG (une version améliorée et modernisée des Ajets de Tours) ou ceux de la Composante Air belge.

Lors de cette phase, les étudiants effectuent environ 80 heures de vol, beaucoup de vols solo et vont apprendre les bases du combat aérien (combat air-air, air-sol, tir réel, etc…). C'est à l'issue de cette phase, en fonction des résultats et des places disponibles, que les élèves vont rejoindre l'Escadron de transformation Rafale (ETR) 3/4 « Aquitaine » pour opérer sur Rafale, ou l'Escadron de chasse 2/5 « Ile de France » pour être formé sur Mirage 2000 (-5F ou D par la suite).

  • Et le navigateur dans tout ça ?

La séparation pilote/navigateur se fait à l'arrivée à l'EISPN (Escadron d'instruction au sol du personnel naviguant). Le nav passe de la DFC (Division formation commandement) au CFAMI (Centre de formation à l'aéronautique militaire initiale). L'EISPN est différent pour les NOSA puisqu'ils ne passent pas l'ATPL, ils ont un programme plus allégé car toute la partie purement civile est supprimée. Cela dure environ 4 mois.

Vient ensuite l'arrivée à l'EFNC (Escadron de formation des navigateurs de combat 1/93 « Aunis »). Une quinzaine de simulateurs axés sur l'orientation radio-électrique et l'IFR sur avion Bonanza et 3 ou 4 BITD sur SR-20 pour découvrir la navigation basse altitude.

Débutent alors les vols sur Cirrus SR22, une centaine de chevaux de plus que le SR20 avec une vitesse de croisière à 150kt contre 120kt pour le SR20. Un avion différent car à bord il y a le pilote et l'élève à droite, ainsi que le moniteur-nav à l'arrière et assez souvent un autre élève qui fera le retour en cas de posé sur un terrain extérieur.

Plusieurs phases composent la formation. D'abord les BN (Basic Navigation), qui familiarisent avec la navigation en BA, l'environnement de l'avion. C'est environ 15 missions. Puis la phase IFR avec 5 ou 6 missions d'IFR pur, et enfin la phase MN (Mixed Navigation) avec les premiers vols de type Haut-Bas, avec une gestion timing et un « target » avec horaire imposé. Cela représente environ 15 missions.

Là se fait la séparation avec une commission d'orientation pour choisir la spécialité. A noter qu'il n'y a habituellement pas de places Transport si personne n'en fait la demande, et même si elle est faite la place n'est pas garantie car il y a un déficit de nav en Chasse.

Les nav Chasse effectuent une phase de pré-spé Chasse avec introduction basique de la menace en plus des objectifs MN, tout cela avec environ 10 missions, puis partent à Tours. Les nav orientés transport tactique effectuent toute leur spé Transport à l'EFNC. Il y a deux navigations : tactique et stratégique. Mais la stratégique est amenée à disparaître avec l'arrivée des MRTT et des E-3F Sentry modernisés.

Il y a d'abord une dizaine de séances sur simulateurs avec des simu plus poussés, dont des missions spécifiques (Afrique, conditions givrantes, vol longue durée…). Puis arrivent les vols avec environ 10 IFR et 10 Haut-Bas. Les basses altitudes sont d'un niveau plus élevé avec des menaces air-air et sol-air, des communications avec AWACS et bien-sûr des simulations de largage. Les pilotes commencent à tracer sur des cartes au 100 000 ou 50 000, au lieu de la classique 500 000.

La spé Transport dure environ 4 mois, puis l'élève obtient son macaron au bout d'environ 150 heures de vol à poste sur SR22. Les nav Chasse passent environ 8 mois à l'EFNC, contre 12 ou 13 en transport. Les chasseurs partis à Tours y passent environ 8 mois puis sont macaronnés. Ils rejoignent ensuite Cazaux pour 4 à 6 mois pour y apprendre toute la partie tactique et le combat aérien.

Mais ce cursus de formation, bien qu'il conservera quatre phases, va être simplifié et rationalisé avec la mise en place du projet FOMEDEC et l'arrivée des PC-21.

© R. Nicolas-Nelson / Armée de l'Air - Vol en formation de trois Alpha Jet de la base aérienne de Tours.

© R. Nicolas-Nelson / Armée de l'Air - Vol en formation de trois Alpha Jet de la base aérienne de Tours.

2. Qu'est-ce-qui change avec le projet FOMEDEC ?

Pour l'instant, l'armée de l'Air conserve l'ensemble de la phase 1 sur la base aérienne de Salon-de-Provence, ainsi que la phase 2a avec les Grob 120 sur la base de Cognac. Toutefois, la phase 2b sur TB-30 Epsilon et la phase 3 sur Alpha Jet à Tours sont réunies en une seule et même phase sur le PC-21. Ce dernier, avec un parc actuel composé de 17 appareils, remplace donc une trentaine d'Epsilon et les 25 Alpha Jet de Tours.

Cette phase se décompose en deux étapes avec une phase Basic de six mois, et une phase Advanced de six mois aussi. Lors de la phase Basic les élèves apprennent les bases du pilotage avec, par exemple, la gestion des pannes, de la voltige, du vol en formation, de l'entraînement à la navigation, des vols de nuit, etc… Au cours de l'Advanced, ils vont découvrir les principes de base comme « l'interception simple ou la délivrance de l’armement », explique l'armée de l'Air. Ce sont des missions plus complexes et modernes avec, par exemple, l'utilisation d'un système de simulation qui permet de simuler des menaces air-air ou sol-air, tirer des missiles air-air, larguer des bombes air-sol en palier ou semi-piqué, utiliser de la liaison de données, des cartes numériques, ou s'entraîner à l'analyse, au traitement et à la prise de décision en temps réel.

Le PC-21 est un avion moderne et puissant qui permet aux élèves-pilotes de commencer à travailler des missions particulières directement lors de leur formation en école, et non plus lors de leur arrivée dans un escadron opérationnel. « Une très grosse majorité des matières enseignées sur PC-21 n'étaient abordées que lors de l'arrivée en escadron opérationnel dans l'ancien cursus », nous explique-t-on. « Il y avait jusqu'à présent un gros décalage entre l'aviation de formation et les escadrons opérationnels. Il suffit de comparer l'avionique de l'Alpha Jet NG avec celle du Rafale », est-il aussi ajouté.

Outre les missions en vol, la formation et l'entraînement sur simulateur est une partie très importante de cette étape. L'armée de l'Air dispose de simulateurs de vol (Full Mission Simulator), de simulateurs de vol simplifiés (Part Task Trainer, PTT), des simulateurs d'éjection, des moyens de formation informatique (Computer Based trainer, CBT) et des systèmes de préparation de mission et de restitution de mission (SPRM).

Ainsi, environ 40% de la formation sur PC-21 est pratiquée sur les simulateurs au sol, ce qui représente environ 80 heures de vol. Ces derniers peuvent se connecter en réseau afin de rendre la mission plus complexe, avec plusieurs avions donc. Les simulateurs nous sont décrits comme « ultra réalistes » et les systèmes de préparation et de restitution des missions comme étant « superbes ».

Le PC-21 est équipé du turbopropulseur PT6A-68B du canadien Pratt & Whitney qui délivre 1 600ch. Couplé à ses cinq pales, il permet un décollage sur un peu moins de 490m, avec un taux de montée de 20.78 m/sec et une distance d'atterrissage sur 1 031m. Avec une vitesse de croisière de 624km/h et une pointe pouvant aller à 689km/h, l'appareil peut aller chercher de +8G à -4G lors de session de voltige aérienne, ou évoluer entre +5G et -2,5G lors de conditions d'évolutions normales.

Pouvant décoller avec une masse maximale au décollage de 3 100kg, le PC-21 est long de 11,22m, large de 9,11m et de 3,75m. Son turbopropulseur et ses systèmes de contrôle lui permettent d'évoluer dans des domaines de vol (basse et haute altitude, basse vitesse…) proches du Rafale ou du M2000.

« Les 100kts de moins que l'Ajet ne sont pas du tout un obstacle pour passer sur Rafale, le défilement et même plus important car grâce à la radio sonde on peut voler à 330ft sol », nous explique un utilisateur.

Cette phase terminée, les élèves-pilotes récupèrent la phase 4 de l'ancien cursus, aussi appelée phase « Rated » (combat aérien de nouvelle génération), avec les Alpha Jet NG de Cazaux au sein des ETO.

© Pilatus Aircraft Ltd - Un PC-21 de l'armée de l'Air dans les montagnes suisses.

© Pilatus Aircraft Ltd - Un PC-21 de l'armée de l'Air dans les montagnes suisses.

Actuellement, le projet FOMEDEC se déroule comme décrit dans les paragraphes ci-dessus, et les premières promotions ont déjà débuté leur formation sur cet avion, courant début 2019. Au final, cette nouvelle organisation permet à l'armée de l'Air de gagner six mois en terme de formation, et ainsi d'intégrer plus rapidement de nouveaux pilotes et NOSA dans ses escadrons, dont certains manquent de personnels navigants. Mais dans les prochaines années, le cursus de formation devrait encore évoluer.

En effet, l'armée de l'Air réfléchit actuellement à ramener à Salon-de-Provence la phase de tronc commun (phase 2a) sur Grob 120 qui se fait à Cognac. C'est donc dans ce cadre là que l'armée de l'Air cherche à acquérir un nouveau vecteur qui remplacerait à la fois la flotte des Cirrus SR-20/SR-22 et celles des Grob 120, et faire de la phase 1 et 2a en une seule et même phase.

Contactée par Defens'Aero, l'armée de l'Air a officiellement confirmé ce changement. « L'Armée de l'air est lancée dans une dynamique de modernisation et de rationalisation de son outil de formation du personnel navigant. Cette rationalisation vise à simplifier le cursus de formation du pilote de chasse (passer de 4 avions sur 4 plateformes à 2 avions sur 2 plateformes) et ainsi gagner 10 mois sur la formation de nos stagiaires », nous est-il expliqué.

« Ainsi les deux premières phases de formation (phase 1 actuellement sur SR20 et phase 2A sur G120) devraient être fusionnées en une phase élémentaire sur un avion adapté à l'horizon 2025, que l'Armée de l'air souhaite mettre en œuvre à Salon-de-Provence », avons-nous appris.

L'argent économisé grâce à ce nouveau cursus (environ 100 millions d'euros) et le temps gagné, environ 10 mois, permettra peut-être de compenser les retards pris dans la formation au niveau des escadrons opérationnels.

© ETR 3/4 « Aquitaine » - Un stagiaire dans l'aile de son moniteur, lors d'une mission de formation.

© ETR 3/4 « Aquitaine » - Un stagiaire dans l'aile de son moniteur, lors d'une mission de formation.

3. Des retards dans la formation au sein des escadrons opérationnels :

Pour les lecteurs assidus de Defens'Aero ou de la presse spécialisée, il est su que l'armée de l'Air est actuellement et depuis quelques années sur-engagée. La Loi de programmation militaire tablait sur un niveau d'engagement en opération extérieure de 7 000 heures de vol, 12 chasseurs déployés, 100 tirs par an sur deux théâtres d'opérations.

En réalité c'est quatre OPEX (BARKHANE au Sahel, CHAMMAL au Levant, HERODOTE en Libye, AMBRE en Ukraine…), 3 bases aériennes projetées, une vingtaine de chasseurs en fonction des périodes, une centaine de tirs par mois et environ 13 500 heures de vol. Ce sur-engagement entraîne des tensions sur le matériel (indisponibilité) et le personnel (fatigue) de l'armée de l'Air.

Ainsi, la disponibilité est faible en métropole que ce soit sur les avions de combat ou le matériel qui est indisponible (soit car il ne fonctionne pas ou car le trop faible nombre de systèmes fait qu'ils sont pratiquement tous en OPEX). L'armée de l'Air manque de ROVER, de MIDS (liaison L16), de détecteurs de départ missiles, d'optronique secteur frontal (OSF), de bombes, de nacelles (19 DAMOCLES, 12 RECO-NG, 4 ASTAC…).

D'après le rapport « Défense, préparation et emploi des forces : Air » du député Jean-Jacques Ferrara, la BA 118 de Mont-de-Marsan dispose de 47 Rafale Air. Sur ces 47 Rafale, 15 sont en maintenance et/ou stockés, 10 engagés en Jordanie et à Al Dhafra, 4 sont utilisés pour la PO, 3 en alerte opérationnelle, 5 réservés pour la formation des Qataris (SOUTEX) et 3 pour les expérimentations au CEAM. Il ne reste donc que 7 Rafale pour l'entraînement et la formation des pilotes.

Autre exemple, Mont-de-Marsan devrait avoir à sa disposition au minimum trois nacelles DAMOCLES pour assurer correctement l'entraînement et la formation des équipages. Il y en a aujourd'hui qu'une de disponible entre l'indisponibilité et leur utilisation en OPEX.

Par ailleurs, ce sur-engagement occasionne une baisse de la qualité de la préparation opérationnelle. Les pilotes doivent effectuer au minimum 180HDV/an (recommandations OTAN) pour entretenir tout le spectre des missions. Or, ces pilotes effectuent sur trois ou quatre mois seulement une centaine d'HDV en OPEX et sur des missions bien précises (Close air support, Air interdiction et reconnaissance). Ils ne leurs restent alors plus que peu de temps pour s'entraîner, le reste de l'année, sur d'autres missions du haut du spectre : Entry force, action en profondeur, supériorité aérienne, etc…

© S. Dupont / Armée de l'Air - Un Mirage 2000B de l'EC 2/5 « Ile de France », qui forme les pilotes sur M2000.

© S. Dupont / Armée de l'Air - Un Mirage 2000B de l'EC 2/5 « Ile de France », qui forme les pilotes sur M2000.

Cette situation entraîne donc un allongement de 30% en moyenne de la formation des pilotes et des NOSA dans la Chasse lors de leur arrivée en escadron opérationnel. M. Ferrara a réalisé un intéressant comparatif entre la formation « normale » d'un aviateur en escadron opérationnel (pilote/navigateur opérationnel ; sous chef de patrouille/navigateur ; chef de patrouille/navigateur) et celle en vigueur aujourd'hui en raison du sur-engagement.

  • RAFALE (pilote) :
    • Théorie : 8 mois à l'ETR —> 6 mois pour être PO —> 14 mois pour être SCP —> 12 mois pour être CP = 3 ans et 4 mois.
    • Réalité : 8 mois à l'ETR —> 7 mois pour être PO (+1) —> 19 mois pour être SCP (+5) —> 14 mois pour être CP (+2) = 4 ans (+ 8 mois).
  • MIRAGE 2000D (pilote) :
    • Théorie : 4 mois à l'EC 2/5 —> 6 mois à l'ETD —> 8 mois pour être PO —> 12 mois pour être SCP —> 10 mois pour être CP = 3 ans et 4 mois.
    • Pratique : 4 mois à l'EC 2/5 —> 6 mois à l'ETD —> 10 mois pour être PO (+2) —> 15 mois pour être SCP (+3) —> 14 mois pour être CP (+4) = 4 ans et 1 mois (+ 9 mois).
  • MIRAGE 2000D (navigateur) :
    • Théorie : 8 mois à l'ETD —> 10 mois pour être NO —> 12 mois pour être SCN —> 10 mois pour être CN = 3 ans et 4 mois.
    • Réalité : 8 mois à l'ETD —> 13 mois pour être NO (+3) —> 16 mois pour être SCN (+2) —> 20 mois pour être CP (+13) = 4 ans et 10 mois (+ 18 mois).
  • MIRAGE 2000-5F (pilote) :
    • ​​​​​​​Théorie : 4 mois à l'EC 2/5 —> 10 mois pour être PO —> 12 mois pour être SCP —> 12 mois pour être CP = 3 ans et 2 mois.
      Pratique : 4 mois à l'EC 2/5 —> 13 mois pour être PO (+3) —> 14 mois pour être SCP (+2) —> 25 mois pour être CP (+13) = 4 ans et 8 mois (+ 18 mois).

Outre les retards en terme de formation, il y a aussi un manque en terme d'effectif. Ainsi, on peut lire dans le rapport que « selon le directeur des ressources humaines de l’armée de l’air, le général de corps aérien Rony Lobjoit, il manquera près de cent pilotes de Rafale dans cinq ans, soit un cinquième des besoins ». Enfin, il est aussi écrit que sur la base aérienne 133 de Nancy-Ochey, « il manque près de vingt navigateurs pour armer l’ensemble des avions, soit un escadron ».