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Le Rafale ne se posera pas au Canada

Le Rafale ne se posera pas au Canada

© ARC - Deux Rafale Air en vol avec un CF-188A Hornet canadien pendant l'exercice MAPLE FLAG 2016.

© ARC - Deux Rafale Air en vol avec un CF-188A Hornet canadien pendant l'exercice MAPLE FLAG 2016.

Dans un communiqué de presse publié le 12 décembre 2017, l'Aviation royale canadienne (ARC) a officiellement annoncé le processus d'acquisition « ouvert et transparent » d'un nouvel avion de combat afin de remplacer son actuel parc aérien composé de 85 vieillissants CF-188A et CF-188B Hornet, ainsi que la commande de 18 Hornet d'occasions auprès de l'Australie.

Cette annonce a été suivie, deux mois plus tard, en février 2018, par la publication d'une requête pour informations (Request for Information, RFI) envoyée à tous les avionneurs potentiels qui souhaitent participer à ce marché : le consortium Eurofighter avec le Typhoon (ici vendu par le Royaume-Uni), Boeing avec le F/A-18E/F Super Hornet, Lockheed Martin avec le F-35A Lightning II, Saab avec le Gripen JAS-39E/F et Dassault Aviation avec le Rafale F3-R. Mais l'avionneur français a finalement décidé de ne pas participer à cette compétition. En effet, d'abord dévoilée par l'agence de presse Reuters, l'information a ensuite été confirmée par Thierry Carlier, le directeur du développement international à la Direction générale de l'armement (DGA). 

« Nous avons eu un échange avec nos homologues canadiens. Je suis donc en mesure de confirmer » que Dassault Aviation s'est retiré de l'appel d'offres a expliqué M. Carlier. « A ce stade, on était dans un 'Request for Information' (RFI), une phase d'échanges préliminaires sur les conditions dans lesquelles allait se dérouler cette compétition. On leur avait dit dès le départ qu'on n’était pas certain à l'issue de cette phase d'échanges qu'on y participerait avec le Rafale. Effectivement, c'est ce qui s'est passé », a-t-il également ajouté.

L'une des raisons principales, si ce n'est la raison, résulte du fait que la France n'appartient pas au club des « Five Eyes » qui regroupe les services de renseignement des Etats-Unis, du Royaume-Uni, de la Nouvelle-Zélande, du Canada et de l'Australie. Même si le partage du renseignement se fait entre cette organisation et la France, il semblerait donc que sa non-participation soit une faiblesse dans ce contrat d'armement. « On a considéré qu’un certain nombre de conditions n’étaient pas remplies pour que ça représente un intérêt » a également précisé Thierry Carlier.

Pour rappel, lors de l'annonce officielle en décembre 2017, Ottawa indiquait que « dans un premier temps, le gouvernement dressera une liste de fournisseurs, qui comprendra des gouvernements étrangers et des fabricants de chasseurs ayant montré qu’ils sont capables de répondre aux besoins du Canada ». Il s'agit d'un « processus concurrentiel » qui permettra au Canada « d'obtenir le bon chasseur à un juste prix et de créer des retombées économiques optimales pour les Canadiens ».

Dans ce contexte là, « les fabricants et les industries canadiennes de l’aérospatiale et de la défense [seront] consultés au cours du processus », tandis que « l’évaluation des propositions comprendra aussi un volet sur l’incidence des soumissionnaires sur les intérêts économiques du Canada ». Si l'un des potentiels vainqueurs ne se montre pas apte à répondre à ces critères, il est affirmé que « ce soumissionnaire sera nettement désavantagé ».

Par ailleurs, pour sélectionner le prochain avion de combat canadien, les autorités effectueront « une évaluation rigoureuse qui portera sur le coût, les exigences techniques ainsi que les retombées économiques ». Le Canada justifie cet appel d'offres « car il permettra d’assurer la sécurité des Canadiens et de remplir les obligations internationales du Canada en matière de défense ». Les clients ont aussi l'obligation « d'investir au Canada une somme égale à la valeur du contrat ».

Chronologiquement, en février 2018, la requête pour informations (Request for Information, RFI) est envoyée à tous les avionneurs potentiels qui souhaitent participer à ce marché. Dans le courant du début de l'année 2019, c'est la demande de proposition (Request For Proposal, RFP) qui est publiée avec « une planification approfondie et la mobilisation des intervenants ».

Par la suite, l’attribution du contrat devrait se faire début 2022, la livraison du premier chasseur en 2025 et celle du dernier en 2031. Le contrat est estimé entre 10 et 13 milliards d'euros. Au total, l'Aviation royale canadienne prévoit de mettre en oeuvre 88 exemplaires de l'appareil acheté.

A ce jour, la compétition se joue entre le F-35A Lightning II de Lockheed Martin, dont la position est très délicate en raison des tensions avec Boeing et de son impopularité chez les Canadiens, le JAS-39 Gripen de Saab, le Typhoon d'Eurofighter et le F/A-18E/F Super Hornet de Boeing.

La presse nationale a récemment rapporté que Saab devrait annoncer au cours de ces prochaines semaines son retrait de la compétition. Il est également nécessaire de rappeler que lors du lancement du processus acquisition d'un nouvel avion de combat, Ottawa et Bombardier étaient en froid avec Washington et Boeing. En effet, le Département américain du Commerce (DOC) a imposé à l'avion civil C-Series de l'avionneur canadien Bombardier des droits compensatoires de 220 % et des droits antidumping de 79,82 % à la suite d'une infraction contre sa politique de vente de produits à des prix inférieurs à leur prix de revient.

Outre l'achat d'un nouvel avion de combat, Ottawa a aussi officialisé son rapprochement avec Canberra et la Force aérienne royale australienne (Royal Australian Air Force, RAAF). L'ARC souhaite se procurer 18 F/A-18A/B Hornet australiens d'occasions, ainsi que des pièces de rechange, afin de soulager son actuelle flotte de CF-188 en attendant l'arrivée du prochain combattant. Pour un montant d'environ 500 millions de dollars, ces appareils doivent arriver au Canada en 2019.

Bien qu'il ne s'agisse pas d'avions de combat neufs, l'achat de ces Hornet d'occasions permettrait à l'Aviation Royale Canadienne de faire des économies et lui éviterait de devoir former des aviateurs (pilotes, navigateurs, mécaniciens, armuriers, spécialistes vecteur, avionique, etc…) sur l'utilisation du Super Hornet. Bien qu'il soit une évolution du Hornet, il reste toutefois largement amélioré avec un système de mission différent, des performances autres, des pièces de rechange qui ne sont pas toutes compatibles avec les Hornet Legacy, des conditions d'emploi et des équipements offensifs et défensifs nouveaux, etc…