Au début de l'année, dans un communiqué de presse publié à l'occasion du sommet franco-britannique organisé à l’Académie royale militaire de Sandhurst, au Royaume-Uni, le 18 janvier 2018, le Ministère britannique de la Défense (UK MoD) a annoncé que la Royal Air Force allait déployer trois hélicoptères de transport lourd CH-47 Chinook au Sahel. Six mois plus tard (!), ce déploiement est désormais physiquement lancé puisque les trois hélicoptères sont arrivés à Gao, dans le nord du Mali.
En effet, dans un communiqué de presse publié par l'UK MoD le 18 juillet 2018, il est expliqué que les trois Chinook ont rejoint le continent africain. Ces appareils ont d'abord été acheminés par des C-17 Globemaster III sur la base aérienne de Niamey, au Niger. Là, les éléments retirés pour le transport, dont les pales, ont été remontés sur les hélicoptères, avant d'effectuer des contrôles de navigabilité pour s'assurer que les hélicoptères sont aptes à prendre les airs. C'est à ce moment là qu'ils ont rejoint le camp de Gao, dans le nord du Mali.
Pour préparer ce déploiement et permettre leur sortie aérienne au cours de ces prochains mois, un important chantier a été réalisé par « l’antenne infrastructure de Gao de la force Barkhane », explique l'Etat-Major des Armées. Débuté en mars 2018, les militaires français et des entreprises locales, ont réalisé « des travaux de terrassement afin de pouvoir couler le dallage en béton de la plateforme de plus de 17 000 m² ». Il a aussi été nécessaire de conduire des « travaux de terrassement, de mettre en place les longrines pour les futurs hangars des aéronefs, ferrailler la dalle et le taxiway », de poser des murs de protection et d'installer des abris modulaire.
L'EMA souligne que « cette dalle devait répondre à un cahier des charges strict, offrir une résistance de 40 Mpa et être construite rapidement dans des conditions météorologiques parfois difficiles, notamment en raison des tempêtes de sable fréquentes ». En outre, si les travaux sur la base ont commencé en mars 2018, il a été nécessaire d'effectuer des études techniques dès janvier 2018. Dans ce contexte, des militaires britanniques envoyés au Mali ont « rédigé avec [leurs] partenaires les documents techniques et juridiques constituant l’appel d’offres ».
Ces trois machines sont soutenues au sol par un détachement composé de 90 militaires (mécaniciens, armuriers, spécialistes, commandos, etc...) qui sont issus de la base aérienne de Odiham, située dans le sud du Royaume-Uni. Cette base accueille trois escadrons de CH-47 avec le No 7 Squadron du Joint Special Forces Aviation Wing, et les No 18 et 27 Squadron des forces conventionnelles.
Sur place, les hélicoptères assureront uniquement des missions de transport de fret et de troupes puisque le Ministère britannique de la Défens précise qu'ils n'effectueront pas des missions de combat. Cette particularité pose la question du domaine d'action de ces hélicoptères. En effet, est-ce-que les appareils réaliseront uniquement des missions de transport de troupes et de fret entre les différentes bases ?, ou est-ce-qu'ils se permettront d'aller acheminer du fret et des troupes directement sur le terrain, que ce soit en début, cours ou fin d'une opération de Barkhane.
Dans son point de situation des opérations en date du 26 juillet, l'Etat-Major des Armées explique que « le 20 juillet, les Chinook du contingent britannique engagé aux côtés de Barkhane ont effectué leur première mission d’acheminement de personnels sur la ville de Menaka. Cette mission a permis de valider les procédures conjointes mises en place ».
Ce déploiement permettra d’accroître la mobilité des forces de Barkhane, limitées par les capacités réduites des hélicoptères de manœuvre Puma/Super Puma et NH-90TTH Caïman de l'Aviation Légère de l'Armée de Terre, ainsi que par la disponibilité qui fait parfois défaut. Elle reste toutefois largement supérieure à celle que l'on trouve en métropole, en raison notamment de l'important effort fourni pour assurer le fonctionnement des hélicoptères en opération. En outre, elle pourrait aussi permettre au Ministère des Armées de limiter sa forte dépendance aux appareils loués à des sociétés privées, comme les avions de transport An-32, An-26 et Beechcraft 1900D, ou les hélicoptères Mi-8/17.
Enfin, ils permettront également de limiter certains déplacements par la voie terrestre. Ces convois doivent faire face aux difficultés du terrain (enlisement, poussière, crevaisons, etc...), aux immenses distances entre les bases (plusieurs centaines voire milliers de kilomètres), et aux actions jihadistes (IED, attentat suicide, etc...). Ces attaques peuvent parfois entraîner des blessés légers ou lourds, voire des décès, et détruire des véhicules terrestres.
Le Royaume-Uni dispose actuellement d'une flotte composée d'une cinquantaine de CH-47 Chinook Mk.3, Mk.4 et Mk.6. Si le nombre de trois appareils peut paraître léger au regard de la flotte, il faut aussi prendre en compte les impératifs, la disponibilité et les besoins, d'abord, des militaires britanniques.
Certains de ces appareils sont en maintenance courte ou sur du long terme, d'autres subissent des modernisations, des appareils doivent être conservés pour leurs propres opérations, que ce soit avec les forces conventionnelles ou spéciales, tandis que le restant doit être utilisé pour les missions d'entraînement et de formation des équipages navigants les plus jeunes.
Les Chinook britanniques, 30m de long pour une hauteur de 5,7m, sont propulsés par deux turbomoteurs Textron Lycoming T55-L712F de 3,148ch chacun. Avec une vitesse maximale de 160 noeuds, soit pratiquement 300km/h, ces «bus volants» peuvent atteindre une altitude maximale de 15 000 pieds (4 570 mètres) avec un taux de montée de 10m/s.
La mise en oeuvre de l'appareil se fait par un équipage de quatre naviguants avec un pilote, un copilote, un loadmaster et un quatrième personnel chargé de la protection. Au total, l'appareil peut embarquer jusqu'à 55 militaires, mais généralement, la Royal Air Force explique qu'il y a entre 24 et 40 pax par soute.
Pour pouvoir opérer en territoire hostile, les Chinook disposent en autoprotection de deux M134 Minigun de 7.62mm, installées sur les côtés, et d'une M60D qui peut se monter sur la rampe arrière afin de couvrir au maximum l'ensemble de l'hélicoptère. En outre, ils disposent d'un ensemble d'équipements de protection avec détecteur de verrouillage radar, système d'alerte d'approche de missiles infrarouges ou électromagnétiques, brouilleur infrarouge et lance-leurres infrarouges et de paillettes.
Par ailleurs, dans le cockpit et suivant les versions, les Chinook sont équipés d'un système de positionnement par satellite, d'une capacité aux vols de nuit avec un tableau de bord qui s'adapte aux jumelles de vision nocturne, d'une avionique avec écrans numériques, de plusieurs systèmes de communication, d'ordinateur de bords améliorés, etc… Les Chinook sont principalement utilisés pour des missions de transport de troupes, de matériels et d'évacuation médicale (MEDEVAC). Ses capacités lui permettent de transporter 10 tonnes de fret, que ce soit dans la soute ou sous élingue.