Aujourd'hui, les escadrons de l'Armée de l'Air française et les Flottilles de la Marine Nationale mettent en oeuvre 149 Rafale C/B/M (sur un total de 180). Si la Chasse Embarquée a réceptionné la totalité de ses Rafale M après le rétrofit des premiers Rafale M au standard F1, l'Armée de l'Air doit encore réceptionner 31 avions. En effet, cette année 2018, l'Armée de l'Air recevra (ou sera «remboursée») les trois Rafale B qui ont été livrés à l'Egypte et qui lui étaient initialement destinés.
Passée la livraison de ces trois biplaces, et en raison des décisions prises par la LPM 2019-2025, trois années sans livraisons ont été décidées pour ce qui concerne 2019, 2020 et 2021. Les livraisons françaises reprendront alors en 2022 et jusqu'en 2025 avec la livraison de 28 Rafale C/B exclusivement à l'Armée de l'Air.
Dans les prochains mois, Dassault doit annoncer la validation du standard F3-R très bientôt et signer la contractualisation du standard F4 en fin d'année. En perspective des années 2030, une 5ème tranche de Rafale est aussi prévue entre Dassault et Paris, et cette tranche doit être contractualisée autour de 2023 pour des livraisons qui s'étaleraient alors de 2027 à 2030. Cette situation, en plus des premiers contrat à l'export, permettra l'ouverture des chaines d'assemblage dans le temps long et ainsi de proposer le Rafale à l'exportation, au moins, jusqu'en 2030, explique Eric Trappier, le PDG de Dassault Aviation devant la Commission de la défense nationale et des forces armées à l'Assemblée Nationale.
Par ailleurs, toujours dans le cadre de l'exportation du Rafale et en réponse aux questions des parlementaires présents lors de l'audition, M. Trappier a longuement développé le potentiel et le futur du Rafale à l'international, avec les cadences dans les usines de Bordeaux-Mérignac et chez les sous-traitants français, l'ambition des ventes, les pays acquéreurs, etc…
«Il fallait absolument gagner la bataille de l’exportation et l’équipe France a réussi cette bataille. Aujourd’hui, grâce à l’exportation, on est passé au-dessus. C’est-à-dire que non seulement on est au-dessus de un [avion par mois, NDLR], mais qu'on est aussi au-dessus de deux», affirme Eric Trappier concernant la cadence de production. «On est en train de passer à peu près au-dessus de deux puisqu’il y a un moment donné où il va falloir livrer un certain nombre d’avions de manière cohérente, donc livrer beaucoup plus que onze avions par an. En particulier dans les années 2019-2020, là où l’Inde va être en parallèle de la livraison du Qatar », ajoute-t-il.
Et l'augmentation de la cadence doit être poussée par les contrats à l'exportation et les ambitions de Dassault. A ce sujet, il est dit que «pour le Rafale, l’ambition [française] était de 320 avions. C’est devenu 296, puis 200, etc… et maintenant on en est à 225 vis-à-vis des ambitions françaises ». « En terme d’export, l’ambition de Dassault ça a toujours été de vendre à peu près autant de Rafale qu’on en a pour la France. Donc à l’époque on devait avoir l’ambition, si on avait 300 avions pour la France, de vendre 300 Rafale», expose-t-il.
« Aujourd’hui, on est déjà à 84 Rafale vendus à l’export et si je rajoute les 12 Qataris qui ne sont pas encore comptabilisés, ça fait 96 ». La levée de l'option et la mise en place d'une seconde pour 36 autres avions a été officialisée par une visite présidentielle en décembre 2017, mais elle doit encore être actée par l'envoi du 1er acompte par Doha.
Mais le Moyen-Orient n'est pas la seule région du globe où le Rafale a su se poser. En Inde, «on a potentiellement, si on se débrouille bien, entre 100 et 200 avions à vendre car l’Inde a un gros besoin en avions de combat. Et en ayant réussi ce premier contrat de 36 avions, j’espère que l’on aura des suites », livre M. Trappier.
Pour rappel, en Inde, l'année a été marquée par la création de la «Joint-Venture Dassault Reliance Aerospace Limited et la pose de la première pierre de l’usine de Nagpur en vue de fabriquer dès 2018 des éléments de Falcon 2000 et quelques sous-ensembles de Rafale», explique l'avionneur français.
Pour des prospects supplémentaires, autres que ceux qui sont déjà acquéreurs, l'avionneur français «a des pays au Moyen-Orient qui attendent un petit peu mais qui sont intéressés». Il y a également «des pistes en Asie, en Malaisie par exemple, et grâce à notre réussite en Inde, notre savoir-faire s’est aussi transféré un peu plus loin ».
En ce qui concerne l'Egypte, seule la question du blocage de la vente des missiles de croisière SCALP-EG a été évoquée. Ici, M. Trappier souhaite obtenir des «ITAR free», qui ne bloqueraient pas des ventes faites par la France avec des armements qui contiennent des composants américains. Aujourd'hui, l'Egypte dispose de 14 Rafale EM/DM. Dassault a confirmé ce chiffre dans son communiqué financier en date du 08 mars 2018 et concernant les résultats du groupe Dassault en 2017. Pour rappel, Defens'Aero l'avait annoncé dès le 1er décembre 2017… avec la livraison de la totalité des Rafale EM !
Si M. Trappier n'a pas évoqué les possibilités de voir atterrir le Rafale au Canada, il a cependant évoqué avec inquiétude l'Europe et la Belgique, où il n'a pas montré de signes positifs. En effet, il a manifesté ses mécontentements en assurant « qu'en Europe, je dois vous dire que dans l’Europe dite « Union européenne », si je mets la Suisse de côté, c’est ‘j’achète américain’ ! Vous avez vu les déclarations des américains récemment et du Secrétaire général de l’OTAN […] vous êtes en Europe, vous cotisez 2% du PIB de votre Défense et vous achetez américain. Et garde-à-vous ! La dureté des propos américains et OTAN d’il y a 10 jours contre l’Europe de la Défense et contre les industriels européens est d’une violence terrible ».
« Si je prends la Belgique, tout était tracé pour acheter américain comme pour les Pays-Bas. […] Qui fait la promotion du F35 outre les Américains ? les Néerlandais ! Donc les Néerlandais se font les champions des Américains pour aller vendre en Belgique. C’est quand même un petit peu surprenant », a-t-il condamné.
Et dans ce contexte, il rappelle également l'appel d'offres fantoche lancé par les Pays-Bas et les évaluations réalisées dans ce cadre là : « On a comparé un F35 qui n’avait pas encore fait son premier vol, dont le prix n’était pas garanti puisqu’il n’était même pas encore connu des forces américaines, à un Rafale qui a fait une évaluation complète à Istres, avec un engagement sur les prix «backé» par les autorités françaises, avec un engagement sur les compensations à hauteur de 100%. Et malgré tout, le F35 a gagné avec une note de 6,97 contre 6,95 pour le Rafale ». « Tout ça, c’est du pipeau », a-t-il fini par conclure.