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Des pays de l'OTAN s'associent pour choisir le futur avion de patrouille maritime

Des pays de l'OTAN s'associent pour choisir le futur avion de patrouille maritime

© Marine nationale - Un Atlantique 2 de la Flottille 21F en mission de surveillance au large des côtes bretonnes au-dessus du phare de Penferet, en juin 2017.

© Marine nationale - Un Atlantique 2 de la Flottille 21F en mission de surveillance au large des côtes bretonnes au-dessus du phare de Penferet, en juin 2017.

Actuellement, la Marine Nationale possède une flotte composée de 22 avions de patrouille maritime (PATMAR) Atlantique II, qui sont mis en oeuvre par les flottilles 21F et 23F sur la base d'aéronautique navale de Lann-Bihoué (Morbihan). Ces appareils sont régulièrement utilisés pour des missions opérationnelles dans le nord de l'Europe en soutien des forces de l'OTAN pour le suivi de sous-marin russes, dans la bande sahélo-saharienne, au Moyen-Orient (Irak/Syrie) et dans d'autres contrées où ils sont nécessaires.

Depuis décembre 2016, le Centre d'Expérimentations Pratiques de l'Aéronautique navale (CEPA/10S), Dassault Aviation, Thalès ainsi que la Direction Générale de l'Armement (DGA) sont associés afin de développer le standard 6. Cette version doit équiper, fin 2025, 18 avions rénovés d'après la Loi de programmation militaire 2019/2025. Mais cette nouvelle modernisation ne permettra pas de faire perdurer indéfiniment ces Atlantique II, qui sont censés rester en activité jusque dans les années 2030.

En effet, lors d'une récente audition (11 octobre 2017) devant la Commission de la défense nationale et des forces armées, l’amiral Christophe Prazuck, Chef d’état-major de la Marine nationale (CEMM) a déclaré que la modernisation «permettra de prolonger ces avions jusque dans les années 2030».

«Après, il faudra réfléchir à la génération suivante peut-être avec les Allemands. Faudra-t-il des avions qui volent près des flots ou au contraire à haute altitude, comme les P8 américains ? Uniquement des avions ou un mélange d’avions et de drones à longue portée ? Les Allemands sont dans le même calendrier que nous, puisqu’ils rénovent actuellement leurs P3, qui devront donc être changés dans les années 2030-40. Cela augure bien pour une future coopération», a-t-il expliqué.

C'est donc dans ce contexte là que plusieurs pays de l'OTAN viennent d'accueillir et d'accepter le Canada et la Pologne au sein d'une initiative multinationale dans le but de mettre au point collectivement le futur avion de patrouille maritime. L'incorporation de ces deux pays se fait aux côtés de la France, l'Allemagne, la Grèce, l'Italie, l'Espagne et la Turquie. Dans un communiqué de presse publié le 15 février 2017, l'OTAN explique que cette coopération «vise à développer des solutions de remplacement pour les aéronefs maritimes de lutte anti-sous-marine et de renseignement, de surveillance et de reconnaissance vieillissants. 

A la suite de la signature de cette association, la secrétaire générale déléguée de l'OTAN, Mme Rose Gottemoeller, a déclaré que «cette entreprise conjointe part du constat que la majeure partie des flottes d'aéronefs de patrouille maritime alliées arriveront au terme de leur durée de vie opérationnelle entre 2025 et 2035». Elle a encouragé les pays à «poursuivre jusqu'à la phase de mise en œuvre. Le but ici n'est pas simplement d'avoir un projet conceptuel – nous avons besoin d'une nouvelle génération d'appareils dans les airs pour accomplir une mission qui est de plus en plus importante», a-t-elle ajouté.

L'OTAN assure que cette initiative «offre aux participants la possibilité d'adopter des solutions communes dans ce domaine capacitaire critique». En ce qui concerne le calendrier, dès 2017 les premiers adhérents ont défini des besoins communs, tandis que l'ensemble des travaux doivent se terminer courant 2018. Ces réflexions permettront par la suite de définir plus précisément les besoins mutuels et de choisir le vecteur le plus approprié. Evidemment, comme tout programme en commun, il faut que les besoins de chacun ne soient pas utopiques, qu'ils soient censés et surtout, qu'ils soient réalisables pour que tous les acteurs puissent bénéficier des avantages de ce projet.

© Airbus - L'A320neo ici imaginé dans sa version de patrouille maritime (image de synthèse).

© Airbus - L'A320neo ici imaginé dans sa version de patrouille maritime (image de synthèse).

Le P-8 Poseidon de Boeing est un avion de patrouille maritime déjà éprouvé par des missions opérationnelles à travers l'US Navy, qui déploie de nombreux appareils en Océanie, en Asie, au Proche et Moyen-Orient, dans le Pacifique ou en Europe, ainsi qu'avec l'Indian Navy et la Royal Australian Air Force. En outre, il a aussi été choisi par la Royal Air Force et la Royal Norwegian Air Force, tandis que la Nouvelle-Zélande a montré un intérêt.

Parmi les huit pays qui participent à ce programme, six sont européens. Et dans ce contexte, il pourrait être intéressant pour ces pays de jouer la carte de la «fabrication locale» en renforçant l'industrie aéronautique militaire européenne.

En effet, Dassault Aviation (France) est capable de proposer son Falcon 900MPA, Saab (Suède) a développé le Swordfish, qui se base sur le jet d'affaire Bombardier Global 6000, et Leonardo (Italie) a mis au point l'ATR-72MP qui équipe l'Aeronautica Militare. Une réflexion peut être aussi envisagée avec l'avion CS300 (gamme CSeries) du canadien Bombardier, associé avec Airbus Group via la filiale CSeries Aircraft Limited Partnership (CSALP) détenue à 50,01% par l'avionneur européen.

Mais Airbus Group, en solitaire et non en coopération avec un autre avionneur, a aussi un autre atout qu'il vient récemment de dévoiler. En effet, lors du Singapore Air Show, Fernando Alonso, directeur de la division Avions militaires d’Airbus Defence & Space, a dévoilé que l'entreprise allait développer un avion de patrouille maritime à partir de l'avion moyen-courrier A320neo.

La transformation d'un avion civil en avion militaire arrive après la mise au point de l'avion de ravitaillement en vol A330 MRTT, acheté par l'Australie, l'Arabie saoudite, la Corée du Sud, les Emirats arabes unis, la France, le Royaume-Uni et Singapour. Ces pays s'ajoutent à la Multinational MRTT Fleet (huit appareils) qui comprend la Belgique, le Luxembourg, les Pays-Bas, l'Allemagne et la Norvège.

«Nous avons l’expérience de la conversion de l’A330 en A330 MRTT et nous avons un processus plus efficace», explique-t-il. M. Alonso affirme également que «l'efficacité des moteurs de nouvelle génération [Geared Turbofan de Pratt & Whitney ou LEAP de General Electric/Safran, NDLR] permettra une version militaire performante». D'après lui, la conversion d'un A320neo civil en A320 militarisé, et prélevé sur les chaînes d'assemblage, ne devrait prendre qu'entre six et huit mois.

Concernant les potentialités commerciales, M. Alonso assure «qu’il y a un marché et nous avons [Airbus, NDLR] entamé le dialogue avec plusieurs clients potentiels». Il s'agit notamment de la Nouvelle-Zélande, de la Malaisie, des Philippines, des Pays-Bas, de l'Allemagne et de la France.