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Flotte aérienne de la Sécurité Civile : Une complexe modernisation

Flotte aérienne de la Sécurité Civile : Une complexe modernisation

Les récents, nombreux et importants feux de forêts qui ont eu lieu en France au cours de ces derniers jours ont refait apparaître la question de la modernisation de la flotte aérienne de la Sécurité Civile (SC) et du remplacement des appareils les plus anciens.

Quelle flotte à ce jour ?

La flotte de la Sécurité Civile, outre les 35 hélicoptères EC-145 «Dragon» (GHSC), est composée de 26 avions, dont 23 qui sont consacrés à la lutte contre les incendies.

La flotte la plus importante est celle des bombardiers d'eau Canadair CL 415, qui s'élève au nombre de douze appareils qui peuvent emporter chacun six tonnes d'eau.

Viennent ensuite les Tracker Turbo Firecat (Firecat uniquement étant le nom pour la version avec moteurs à pistons), au nombre de neuf et qui sont, entre autres, utilisés pour des missions de guet aérien en emportant 3,2 tonnes d'eau mélangées à du retardant.

Leur retrait du service actif, qui devait avoir lieu en 2008, a été annulé après l'instauration d'un programme de modernisation dans les années 2000 et le report de l'achat de son remplaçant en raison des difficultés économiques que l'on connait. Ils devraient quitter le service actif en 2022.

Enfin, toujours en matière de bombardement, il y a deux Dash 8Q400MR réceptionnés en 2005 et pouvant emporter jusqu'à 10 tonnes d'eau et de retardant.

En ce qui concerne les missions de liaison et de surveillance, la Sécurité Civile dispose de 3 King 200, de l'avionneur Beechcraft.

Respectivement, ces avions ont pour mission principale le bombardement d'eau, du guet aérien armé, ainsi que des missions de liaison, d'observation et de transport de matériel ou de troupes.

Dans le détail, cela consiste à effectuer une lutte contre les feux de forêt et dans certains cas contre des bâtiments, le transport de personnels et de frets sur des zones sinistrées et des interventions en Europe dans le cadre de l'assistance mutuelle.

© Guillaume Berthon - Le Dash 8Q400MR est le plus imposant bombardier de la flotte de la Sécurité Civile.

© Guillaume Berthon - Le Dash 8Q400MR est le plus imposant bombardier de la flotte de la Sécurité Civile.

Des aéronefs vieillissants, qui enchaînent les heures de vol.

Ces feux à répétition mobilisent et usent les appareils, leurs pilotes ainsi que les mécaniciens au sol qui assurent quotidiennement plusieurs dizaines d'heures de travail, sans relâche, afin d'assurer le meilleur appui aérien possible aux forces terrestres déployées au sol (sapeurs-pompiers, SC, militaires du Ministère des Armées, Croix-Rouge, etc…).

Selon les déclarations du Premier Ministre Edouard Philippe devant les députés de l'Assemblée Nationale ce mercredi 26 juillet 2017, le parc aérien de la Sécurité Civile détient actuellement d'une disponibilité qui se maintient autour des 80%.

La veille, Jacques Witkowski, directeur général de la Sécurité civile et de la gestion des crises a déclaré devant les caméras de BFM TV que les appareils ont «procédé depuis le début de la campagne de feu à près de 4.500 largages d'eau».

Ajoutant à cela que «d'habitude, à cette période de l'année, nous en faisons environ 2.000. Nous avons une sur-mobilisation des machines».

«Depuis le début de la campagne de feu, il y a eu une augmentation de 800 à 9.000 heures de vols. Les avions sont sur-utilisés, bien évidemment des pannes apparaissent», a-t-il également affirmé.

© Guillaume Berthon - Un des Tracker en action.

© Guillaume Berthon - Un des Tracker en action.

Un remplaçant pour les Tracker !

La situation difficile en cette fin du mois de juillet 2017 a poussé Gérard Collomb, Ministre de l'Intérieur, à annoncer officiellement l'achat de six Dash 8Q400MR qui viendront, à terme, remplacer (et non compléter) la vieillissante mais méritante flotte de Tracker.

Toutefois, aucun montant n'a été officiellement communiqué concernant cet achat et le détail des délais de livraison n'a pas été non plus annoncé.

Mais ce n'est pas la bonne volonté du Ministre de l'Intérieur qui a permis cette annonce. Ce n'est ni plus ni moins que la conjoncture actuelle de ces derniers jours qui a poussé Gérard Collomb à confirmer cette nouvelle commande.

En effet, l'appel d'offres mis en ligne le 14 juillet 2016 sur le site du Bulletin Officiel des Annonces des Marchés Publics et publié par la Direction Générale de la Sécurité Civile et de la Gestion des Crises (DGSCGC) a déjà obtenu une réponse il y a maintenant plusieurs semaines.

Mais l'annonce officielle et le feu vert pour la commande des avions a été repoussé à plusieurs reprises depuis février en raison des coupes budgétaires et du report concernant l'ouverture des crédits qui sont destinés à cette commande.

A titre d'information, dans le cadre de cet appel d'offres, la Sécurité Civile souhaitait «acquérir au plus 6 avions multi-rôle bombardier d'eau et transport de même type répondant aux principales caractéristiques suivantes : Avion bi-moteur à turbopropulseur neuf ou d'occasion, dimensions maximum de l'appareil : envergure 42 mètres, hauteur 12 mètres, longueur 44 mètres, capacité sur zone d'au moins 2,5 heures pour les missions de GAAR (Guet Aérien Armé), vitesse de croisière supérieure à 220kt, capacité IFR approche GNSS et P-RNAV, et capacité de bombardement d'eau ou de retardant (capacité au minimum de 7 tonnes) avec largage total ou partiel».

Ces Dash 8Q400MR se chargeront d'effectuer «en tant que bombardiers d'eau, principalement des missions de Guet Aérien Armé contre les feux naissants», ainsi que des missions de «transport de fret, de passagers, transport mixte de passagers et de fret et du transport EVASAN (EVAcuation SANitaire)».

© Guillaume Berthon - Un Canadair CL 415 lors d'un écopage.

© Guillaume Berthon - Un Canadair CL 415 lors d'un écopage.

Les Canadair après les Tracker…

Mais les Tracker, dont leur remplaçant vient donc d'être trouvé, ne sont pas les seuls appareils pour qui la succession pose des questions. Se pose aussi la question de la relève des Canadair CL 415.

La liste des potentiels remplaçants est longue et variée puisqu'elle va de l'AT-802F «Fire Boss» au Beriev 200, en passant par le Twin Otter équipé de flotteurs ou le ShinMaywa US-2 japonais. Mais parmi ces appareils, l'entreprise canadienne Viking Air Ltd semble proposer le meilleur compromis. C'est le Viking 415 EAF, pour Enhanced Aerial Firefigher.

En effet, l'excellent blog du journaliste Frédéric Marsaly détaille dans un récent article ce nouvel appareil dont la production s'apprête à être relancée par l'avionneur canadien qui a racheté les droits auprès de Bombardier en 2016.

Extérieurement, le 415 EAF devrait garder le même profil qu'on lui connait aujourd'hui. Mais à l'intérieur, c'est un tout autre appareil qui devrait sortir des usines. D'après ce blog, «l’ensemble de l’instrumentation de vol [avionique, NDLR], où figure encore des indicateurs à aiguilles classiques, sera remplacée par des écrans multifonction de grande taille mais dont le modèle n’a pas encore été précisé».

Cette avionique modernisée sera donc mise en service sur les appareils neufs sortis d'usine, mais elle pourra aussi être intégrée sur les CL 415 plus anciens puisqu'elle «devrait être disponible en rétrofit pour les Bombardier 415 actuellement en service dans un délai d’environ deux ans», ajoute cette même source.

Viking Air table sur la relance d'une «production d’appareils neufs d’ici 5 à 7 ans avec l’objectif d’atteindre ensuite un rythme de 4 à 5 appareils par an».

Mais avant de pouvoir relancer la construction, il faut qu'un ou plusieurs contrats soient signés. En effet, Viking Air ne souhaite pas relancer cette production tant que 25 415 EAF n'ont pas trouvé un ou plusieurs acquéreurs.

Si la France souhaite se lancer dans ce chantier, tout en limitant les coûts du contrat, elle peut envisager de discuter avec ses voisins européens (Portugal, Espagne, Italie, Croatie et Grèce) qui eux-aussi disposent de Canadair CL 215 et CL 415 et dont le remplacement va devenir une nécessité.

Avec la construction et la mise en service de la Base d'Avions de la Sécurité Civile (BASC) sur l'aéroport de Nîmes-Garons et de par sa vocation européenne, il serait peut-être judicieux pour l'ensemble de ces pays de réfléchir à une commande globale.

Cela permettrait une diminution des coûts lors de l'achat, mais aussi, d'homogénéiser l'ensemble de la flotte et de permettre une meilleure interopérabilité entre tous ces appareils qui sont parfois amener à combattre sur le même front.

Galerie Flickr du photographe en cliquant ici !