Du 21 Octobre au 06 Novembre 2015, l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN) a organisé dans le sud de l'Europe son plus grand exercice depuis 2002, qui a vu, entre autres, la participation de plus de 36 000 militaires issus de plus de 30 nations différentes.
L'exercice « Trident Juncture 2015 », commandé depuis l'état-major de Brunssum (Pays-Bas), a ainsi rassemblé au Portugal, en Espagne et en Italie les forces armées de vingt-huit nations de l'OTAN et neuf autres pays qui sont des partenaires de l'Alliance, comme la Suède, l'Autriche ou l'Ukraine. Que ce soit sur terre, sur mer, ou dans les airs, les multiples missions organisées pendant plus de deux semaines ont eu pour objectif premier de certifier la capacité d’alerte opérationnelle de la NATO Response Force pour 2016 et de faire travailler de concert de nombreuses unités militaires qui ne disposent pas du même matériel afin de renforcer leur coopération et les procédures facilitant leur interopérabilité.
Cet exercice de grande ampleur, dont l'organisation a débuté avant le début du conflit ukrainien, a ainsi vu la participation de plus de 140 aéronefs ainsi qu'une soixantaine de navires qui ont été intégrés au sein du scénario qui porte le nom de « SOROTAN » : contraction du mot « sør », désignant le sud en norvégien et de « OTAN ».
Sur les deux semaines d'exercice, Trident Juncture 2015 a vu un total d'environ trois mille sorties aériennes effectuées par l'ensemble des appareils engagés. On retiendra que l'Espagne à elle seule acceuilli le gros des opérations aériennes puisque mille-deux-cents sorties se sont déroulées au départ de ses bases. La prochaine édition de Trident Juncture est déjà planifiée : elle aura lieu en 2018 en Norvège.
Les bases espagnoles ont elles déjà repris leurs activités habituelles avec notamment TLP 15-04 qui a débuté à Albacete dès le 09 Novembre. Zaragoza hébergera quant à elle le Nato Tiger Meet 2016 au mois de mai prochain, là encore un rassemblement OTAN à ne pas rater.
Au cœur de ce scénario, trois pays imaginaires voisins : le Kamon, le Lakuta et le Tytan. Ces trois nations, connaissant depuis de nombreuses années de vives tensions militaires et politiques au niveau de la région frontalière de Cerasia, sont confrontées à une pénurie en eau sans précédent.
Le Kamon déclenche alors une invasion du sud du Lakuta pour prendre le contrôle d'un barrage clé dans la région et menace également le Tytan. Devant cette agression et la menace pesant sur le Tytan, l'ONU prend une résolution d'intervention de l'OTAN afin de rétablir la stabilité de la région.
Pour « jouer » ce scénario, les différents moyens aériens, terrestres, et maritimes ont été positionnés au Portugal (Beja, Santa Margarida), en Italie (Trapani, Teulada, Poggio Renatic), et en Espagne (Zaragoza, San Gregorio, Albacete, Chinchilla, Sierra del Retin, Sotomayor, Torrejon, Son San Joan, Rota).
Pour ce dernier pays, les deux plate-formes clefs de l'exercice ont été la base aérienne de Zaragoza, où étaient stationnés les avions de transport et les hélicoptères, ainsi que celle d'Albacete, qui accueillait les unités d'avions de combat.
Dans cette première partie, grâce aux deux photographes de Defens'Aero accrédités pour pouvoir assister à cet exercice, zoom exclusif sur l'activité de la base aérienne de Zaragoza le 26 Octobre 2015. La deuxième partie de ce reportage sera consacrée aux aéronefs engagés depuis la base aérienne d'Albacete.
La base aérienne espagnole de Zaragoza, située en Aragon, a accueilli pour la durée de l'exercice plus de 700 personnels militaires issus de douze nationalités différentes. Sur cette base, les parkings et les tarmacs étaient occupés par des hélicoptères de transport et d'attaque au sol, ainsi que par des avions de transport tactique et stratégique, qui avaient chacun une mission bien précise. La plupart de ces moyens aériens intervenaient sur le terrain de manœuvre de San Gregorio, situé à quelques kilomètres seulement de la base.
Nation hôte, l'Espagne avait mis en œuvre trois hélicoptères AS-332 « Super Puma » de l'ALA 48, appartenant au 803 et 402 Escuadrón de Fuerzas Aéreas (Ejercito del Aire). Deux de ces appareils étaient utilisés pour les missions Search And Rescue (SAR) alors que le troisième effectuait les missions de Personnel Recovery.
A leurs côtés, se trouvait également deux hélicoptères d'attaque au sol EC-665 « Tigre » et un CH-47 « Chinook » intégrés dans les forces spéciales espagnoles et issus des Fuerzas Aeromóviles del Ejército de Tierra (FAMET). Enfin, un avion de transport Casa C-295 se trouvait aussi sur la base.
La Belgique était venue avec quatre hélicoptères A109 de sa Composante Air, qui ont été mis à contribution pour des missions Combat Search And Rescue, connues sous l'acronyme CSAR. Quarante-cinq personnes étaient engagés dans ces missions, que ce soit les équipages navigants ou le personnel au sol, ainsi que vingt militaires du Centre d'Entraînement au Parachutisme. Certaines de ces machines étaient équipées en plate-forme d'appui-feu avec deux mitrailleuses de sabord de part et d'autre de la cabine.
La République tchèque avait elle aussi engagé des moyens non négligeables puisqu'elle avait envoyé à Zaragoza six avions d'entraînement et d'attaque au sol L-159 « Alca », utilisés pour les missions d'attaque au sol et six hélicoptères Mi-171Sh d'une Unité Tactique des Opérations Spéciales, accompagnés par un Groupe Tactique des Opérations Spéciales. Un C-295 prenait également part aux missions de transport et de parachutage. L'ensemble de ce détachement tchèque représentait un important contingent d'environ deux-cents militaires. Un des hélicoptères a par ailleurs été perdu le 5 novembre lors d'un accident qui a vu cinq membres de l'équipage n'être heureusement que blessés.
Les États-Unis ont quant à eux été particulièrement présents à Zaragoza, avec pas moins de dix-sept hélicoptères de l'Us Army et un avion de transport léger C-12 « Huron » des Marines, pour un total de plus de deux-cents militaires états-uniens. Sur cette base, on a ainsi pu retrouver pas moins de quatre CH-47 « Chinook » et sept UH-60 et HH-60 destinés aux missions de transport tactique et aux MEDEVAC (Évacuation Médicale). Pour l'appui-feu, l'Us Army avait également déployé cinq hélicoptères d'attaque au sol AH-64D Apache. Ce détachement était aussi complété par deux C-130J Hercules de la Garde Nationale de Rhodes Island (US Air Force) chargés du largage des troupes aéroportées.
Un Apache américain équipé d'une nacelle lance-roquettes, qui supporte les gilets de vol des aviateurs de l'US Army - (c) Rami Khanna-Prade
Outre ces détachements composés de plusieurs dizaines d'aéronefs, d'autres pays ont également déployé du personnel militaire sur place. Ce fut notamment le cas avec la Pologne et son C-295, l'Allemagne avec un C-160 Transall et le Canada, le Danemark, et l'Italie, avec chacun un C-130J Hercules. La Slovénie, pays du centre de l'Europe, était aussi présente dans cet exercice avec l'envoi d'un Groupe Tactique des Opérations Spéciales, composé de vingt-cinq soldats.
Enfin, et sa présence n'est pas anodine, l'Ukraine avait détaché un avion de transport Il-76 qui fut mis en œuvre pour effectuer des missions MEDEVAC. L'invitation de l'Ukraine dans cet exercice de l'OTAN fut une forme de soutien envers ce pays et ses forces armées suite à l'annexion de la Crimée par la Russie.
A noter que l'Iliouchine fut mis à contribution, outre son rôle de MEDEVAC, pour effectuer des rotations de troupes entre les différentes bases hébergeant l'exercice comme cela fut le cas entre Zaragoza et Albacete le 27 octobre en particulier. Grâce à un ingénieux système de double plancher dans sa soute, l'appareil peut en effet emporter deux-cent vingt-cinq personnes
L'équipage ukrainien de l'appareil, aux côtés d'autres partenaires engagés dans l'exercice - (c) Rami Khanna-Prade
La cabine de pilotage du Il-76, équipée de cadrans, et dépourvue de technologie numérique comme sur certains transporteurs plus récents et/ou modernisés. - (c) Mathieu Mounicq
Par ailleurs, il faut aussi souligner la présence du Groupe Aérien Européen (European Air Group), créé en 1995 entre la France et le Royaume-Uni pour améliorer leur interopérabilité, il est aujourd'hui composé, en plus de ces deux pays, de l'Espagne, de la Belgique, de l'Allemagne, de l'Italie, et des Pays-Bas. Avec un état-major basé à High Wycombe, en Angleterre, ce groupe aérien peu connu s'est déployé à Zaragoza, où il était formé entre trente et soixante-dix personnes, dans lequel il a convié la Lituanie et la Suède.
Vous avez la possibilité de retrouver l'ensemble des photographies prises lors de cet exercice sur la galerie Flickr de Mathieu, en cliquant ici !, mais aussi sur la galerie de Rami, ici-même. De nombreux autres albums composent ces galeries, notamment lors de meetings aériens, en France comme à l'étranger. N'hésitez donc surtout pas à vous "promener" dans d'autres albums !